L’AVIS DE MEDIAFILM

EVER DEADLY s’ouvre sur huit minutes inoubliables: deux femmes, perdues dans la beauté austère du Nunavut, se livrent une bataille de chant de gorge, mi-duel, mi-flirt, où elles semblent faire l’amour avec leur voix. Le spectacle – simple mais captivant – est à l’image de ce qui suit, une expérience immersive, au carrefour du concert improvisé et du portrait de femme (et de peuple) éclaté. Tanya Tagaq et la documentariste Chelsea McMullan (MY PRAIRIE HOME) signent en effet un objet singulier, aussi bouleversant dans le fond qu’envoûtant dans la forme. Vertigineuse plongée dans l’âme d’une artiste embrassant ses démons, le film explore également les liens entre les sons et les images, parvenant à communiquer l’indicible par les seuls moyens du cinéma. Au fil de 90 minutes tourbillonnantes, Tagaq semble faire chanter les loups, marcher sur l’eau et enfanter le monde. Elle chante la beauté de sa terre, l’horreur du déracinement, les legs de viols de toutes sortes et la fierté d’être vivante – et heureuse – malgré tout. Du cinéma à couper le souffle, qui célèbre et incarne le pouvoir rédempteur de l’art.

Texte : Georges Privet