L’AVIS DE MEDIAFILM

Sans nier sa dette au film coréen MEMORIES OF MURDER et à la série américaine "True Detective" (duo de policiers antagonistes, décors marécageux, meurtres sordides de jeunes femmes, etc.), l'Espagnol Alberto Rodriguez (l'inédit GRUPO 7) a troussé un polar nerveux et captivant, dans lequel il convoque avec subtilité les fantômes du franquisme. Du reste, le contexte socioéconomique de l'époque - grèves ouvrières, contrebande et trafics divers, influence des propriétaires terriens, patriarcat étouffant, réflexes totalitaristes des autorités, etc. - est habilement campé. En revanche, le récit n'est pas toujours d'une grande clarté et, en rétrospective, accumule les trous narratifs et les développements inaboutis. La mise en scène de Rodriguez possède néanmoins de la vigueur et du style, avec une mention pour les vues aériennes quasi abstraites des contrées andalouses. Remarqué dans LES AMANTS PASSAGERS d'Almodovar, Raul Arevalo incarne avec conviction le flic idéaliste confronté à ses principes, et Javier Gutierrez est très nuancé dans le rôle davantage complexe du partenaire à la fois plus ouvert et plus secret.

Texte : Louis-Paul Rioux