L’AVIS DE MEDIAFILM

Parler de sexualité en République islamiste d'Iran relève pratiquement de la trahison, raison pour laquelle la cinéaste Mitra Farahani devait protéger l'identité de ceux et celles qui acceptaient de témoigner sur ce sujet dans TABOUS. Cela montre l'ampleur du défi à relever dans une société répressive et, comme l'exprime plusieurs femmes, imprégnée d'hypocrisie. Car si la réalisatrice met en lumière des réalités troublantes - la tradition musulmane du sigheh ou «mariage temporaire» autorisant de brèves relations sexuelles et la volonté de plusieurs femmes de faire recoudre leur hymen après la perte de leur virginité -, elle montre aussi l'esprit de liberté qui anime les jeunes générations. Cette mosaïque de témoignages, où les partisans d'un État islamiste rigide côtoient des adolescentes qui aspirent à vivre plusieurs expériences sexuelles avant le mariage, montre bien les dissensions au sein de la société iranienne. Le spectateur occidental sera aussi ébranlé dans ses propres préjugés devant ces portraits sobrement filmés mais d'une grande force évocatrice. Et pour appuyer le caractère subversif, et intemporel, de ces confidences, la cinéaste intercale une dramatisation d'un poème érotique ancien, qui s'avère malheureusement plutôt laborieuse et parfois maladroite.

Texte : André Lavoie