Fr. 2003. Comédie dramatique de Abdellatif Kechiche avec Osman Elkharraz, Sara Forestier, Sabrina Ouazani. Les amours et querelles de quelques lycéens d'une cité en banlieue de Paris, dont certains se préparent à monter une pièce de Marivaux. Étude de moeurs rigoureuse accentuée par un travail remarquable sur le langage. Traitement réaliste. Mise en scène nerveuse. Jeunes interprètes d'un naturel étonnant.
Les amours et querelles de quelques lycéens d'une cité en banlieue de Paris, dont certains se préparent à monter une pièce de Marivaux. Étude de moeurs rigoureuse accentuée par un travail remarquable sur le langage. Traitement réaliste. Mise en scène nerveuse. Jeunes interprètes d'un naturel étonnant.
Après des débuts remarqués avec LA FAUTE À VOLTAIRE en 2000, Abdellatif Kechiche explore dans son second long métrage un univers déjà entrevu chez Jacques Doillon (LE JEUNE WERTHER et surtout PETITS FRÈRES). L'ESQUIVE se positionne justement comme une sorte de «petit frère» de LA HAINE de Mathieu Kassovitz: même étude de moeurs rigoureuse de la «zone», décrite ici avec une violence moins spectaculaire, mais tout aussi sournoise. L'astuce scénaristique (liens entre la vie et le théâtre) permet d'ailleurs de dresser un constat moins noir de ces lieux. Car cette chronique adolescente, avec ses maladresses et hésitations, trouve sa véracité dans un travail remarquable sur le langage, élargissant la fourchette habituelle du vocabulaire hybride et codifié des cités à la langue châtiée de Marivaux. Dans des scènes parfois très courtes, parfois étirées, la caméra, aussi nerveuse que les protagonistes, cadre de près ces non-professionnels toujours en représentation, dont le bagout extrêmement naturel étonne, autant par sa musicalité propre que par sa dureté. Véritable révélation du film, Sara Forestier, seule jeune actrice ayant une expérience de jeu, a su maîtriser le phrasé, la cadence et la terminologie de ces banlieues isoglosses.
Texte : Jean Beaulieu